Atelier-conférence «ABC de l’urbanisme à Aylmer»
La rencontre « ABC de l’urbanisme à Aylmer » s’est tenue le 18 janvier au centre Ernest-Lattion devant 70 personnes environ. Un des objectifs de cette rencontre était d’informer les citoyens sur la manière dont se prenaient les décisions pour autoriser de nouvelles constructions, raser des boisés, créer un nouvel axe de transport, par exemple, mais aussi de leur indiquer comment ils pouvaient s’impliquer dans les processus décisionnels.
Pourtant, dès la mise en place des intervenantes, il était clair que certains ne cherchaient pas seulement des réponses à leurs questions, mais avaient aussi besoin de partager leurs inquiétudes quant au développement de la Ville de Gatineau et particulièrement de leur district. Une courte période de questions adressées à Audrey Bureau, conseillère du district d’Aylmer, l’a d’ailleurs confirmé. Le projet Destination Vanier, le futur édifice du British, la protection des arbres de la forêt Boucher et la culture passéiste de l’appareil municipal en termes de changements climatiques étaient au cœur des pensées et des revendications.
Pendant deux heures, les intervenantes, Audrey Bureau, Micheline Lemieux de l’association du patrimoine d’Aylmer (APA) et les urbanistes de Vivre en ville, ont fait œuvre de pédagogie pour nous entraîner dans les méandres de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme municipal. Dire qu’elles ont apporté des réponses à tout serait mentir. Cependant, la brève période d’échanges a été riche et la qualité de l’écoute de par et d’autre, palpable.
Audrey Bureau a utilisé l’image des poupées russes pour expliquer comment, pour aménager le territoire, on passait des grandes orientations du gouvernement du Québec aux règlements municipaux.
Le schéma d’aménagement de la Ville de Gatineau
Le gouvernement du Québec édicte de grands principes et règles auxquels la Ville de Gatineau doit répondre par un schéma d’aménagement (le nôtre est prévu pour durer jusqu’en 2050).
Dans ce schéma d’aménagement, disponible sur le site de la Ville, on retrouve les cinq grandes orientations retenues par la Ville de Gatineau, dont la gestion de la croissance, la mobilité durable, la valorisation du patrimoine naturel et culturel, ainsi que la création de milieux de vie complets et écoresponsables. Des cartes montrent qu’un périmètre d’urbanisation a été établi pour contrer l’étalement urbain et préserver les zones agricoles qui font aussi partie de la ville. À l’intérieur de ce périmètre, l’espace est découpé selon des priorités d’aménagement : des espaces déjà bâtis à densifier en premier, d’autres à consolider ensuite, puis des espaces en marge, encore non développés, conservés tel quel pour de l’expansion éventuelle.
C’est dans ce document que la Forêt Boucher est définie comme l’un des deux éco territoires de la Ville. On y retrouve aussi des éléments visant la protection des espaces boisés ou la connectivité des milieux afin de conserver les corridors écologiques, comme celui formé par le parc de la Gatineau passant la forêt Boucher, Deschênes menant jusqu’à la rivière des Outaouais. Pour modifier ce document, il faut intervenir auprès du gouvernement du Québec. Par exemple, la fondation de la Forêt Boucher œuvre à ce niveau pour faire clarifier le zonage de cet espace dans le schéma d’aménagement qui entrera en vigueur en 2020.
Le plan d’urbanisme de la Ville de Gatineau
À partir du schéma d’aménagement, la Ville élabore ensuite un plan d’urbanisme. Ce plan d’urbanisme sert à stimuler le milieu (citoyens, associations, milieux d’affaires, élus) et l’amener à se prendre en main, mais toujours en adéquation avec les orientations du schéma d’aménagement. Par exemple, on retrouve dans le plan d’urbanisme un programme ayant permis de reconnaître le caractère particulier et certains enjeux propres au Vieux-Aylmer, le rendant admissibles à des subventions. La mobilisation de l’ensemble des acteurs sera cruciale dans les prochains mois pour en retirer le maximum de bienfaits pour notre milieu de vie.
Les règlements d’urbanisme de la Ville
Ce plan d’urbanisme sert également à encadrer la vie dans la communauté par le truchement de mesures concrètes : les règlements municipaux d’urbanisme. Notamment, pour contrôler la construction des piscines, la localisation des abris d’auto, la hauteur des bâtiments. Les règles sont claires et disponibles sur le site de la ville. On dit que ce sont des outils normatifs : on les applique, c’est tout.
Parfois, l’application des règles est plus compliquée et on doit faire intervenir le pouvoir discrétionnaire, c’est-à-dire que le conseil municipal doit se prononcer sur les cas litigieux. Vu les remous de l’auditoire à l’évocation de ce pouvoir et les nombreuses explications fournies par la conseillère Bureau, il semble évident que la subjectivité des décisions rendues (qui peuvent d’ailleurs être renversées par un tribunal) ne semble convenir ni aux élus, ni aux citoyens. L’assistance ne tarde pas à évoquer le projet particulier de construction (PPCMOI) permettant de construire un bâtiment non conforme au zonage : c’est l’exemple du nouveau bâtiment du British, prévu plus haut que ce que prévoit le zonage actuel. Cela semble toujours un sujet très délicat.
Alors comment le citoyen peut-il s’impliquer et faire valoir son point de vue?
Voter en 2021, pour choisir un élu qui endosse vos convictions et d’ici là faire pression sur les élus actuels en leur écrivant, en posant des questions au conseil municipal.
Faire partie d’un comité consultatif comme le Comité consultatif en urbanisme (CCU) : il suffit d’envoyer son CV quand un poste est vacant ou quand la Ville lance un appel de candidatures. On y prépare, avec des fonctionnaires et des élus, des documents traitant de l’agriculture urbaine, de l’usage des pesticides, des jardins communautaires, par exemple. On signale la naissance d’un nouveau conseil local du patrimoine : avis aux intéressés! Il existe également des opportunités pour ceux et celles qui voudraient discuter du transport (vélo, déplacement durable, etc.) : posez des questions à vos élus.
S’impliquer ou utiliser les services des associations. Micheline Lemieux a expliqué que l’APA fournit des conseils d’architectes en rénovation, restauration, insertion entre deux maisons aux citoyens et aux promoteurs. Cette association milite aussi pour des changements de pratiques à la Ville de Gatineau, tels qu’organiser des consultations citoyennes avant que les projets soient acceptés, produire des cartes 3D des constructions projetées pour les citoyens réalisent mieux les impacts.
Cette remarque trouve un écho dans l’assemblée : plusieurs pensent que les outils et les règlements de la Ville sont en décalage avec les visions vertes actuelles des citoyens. Ils croient qu’un changement de culture s’impose parmi les fonctionnaires pour qu’ils proposent des outils novateurs, en adéquation avec leurs vœux. Mme Bureau a saisi la balle au bond pour soutenir les fonctionnaires qui font leur travail et rappeler qu’être engagé ne se résume pas à s’exprimer sur les réseaux sociaux. Dans le même élan, elle vante les mérites d’un projet pilote émanant du comité de résidents de Wychwood, amené à se généraliser pour l’ensemble de la Ville. La réplique du côté de l’assemblée ne se fait pas attendre : que dire du rapport de force (temps, moyens) qui s’exerce entre les bénévoles des associations et les promoteurs lorsqu’ils débattent de projets? La question restera en suspens. Où sont les promoteurs?