ÉDITORIAL
Aylmer, royaume de la délinquance?
« Trois vagues de méfaits à Aylmer », « Une saisie de drogue de 2 millions de dollars », « Double meurtre à Aylmer », « Agression d’un homme de 70 ans sur le chemin Perry ». Avez-vous remarqué comme Aylmer revient souvent dans l’actualité des faits divers ces deux ou trois dernières années? Pourquoi ai-je l’impression qu’Aylmer est devenu le coin de Gatineau où se déroulent le plus de délits et de crimes? Pourtant, il n’y a jamais eu autant de résidents dans le secteur… preuve qu’il attire toujours autant les candidats à l’achat ou à la location d’un logement. Il y ferait donc bon vivre. Ma perception est-elle donc fausse?
D’abord, il faut bien différencier délit et crime; en anglais, un seul mot existe (« crime »), mais ce terme recoupe deux réalités en français. Toutefois au Canada, on parle de crimes mineurs et majeurs. Sont considérés comme mineurs la publication de propos faux et négatifs sur une personne (la diffamation), le vandalisme, le vol, la fausse publicité ou la possession d’une arme; vendre une grande quantité de drogue, violer ou tuer quelqu’un sont des crimes majeurs.
Il ne faut donc pas confondre crimes mineurs et crimes majeurs. D’une certaine manière, plus de délinquance ne signifie pas la même chose qu’avoir plus de criminalité. C’est moins grave, mais c’est tout de même préoccupant et cela provoque un sentiment d’insécurité. Alors, qu’est-ce qui ne tourne pas rond à Aylmer?
Pour commencer, les statistiques sont claires et indiscutables, elles viennent confirmer la tendance 2015 (12 % de plus), contrairement au reste de Gatineau d’ailleurs (— 5 %). Qu’il s’agisse des délits et crimes contre la propriété, des stupéfiants ou des agressions sexuelles, tout est en hausse. Cependant, pour Mario Harel, la tendance à Gatineau sur plusieurs années (depuis 2009) est à la baisse globalement; de surcroit, et déjà en 2015, on pouvait trouver une cause : l’augmentation de la population d’Aylmer. Un plus grand nombre de résidents entrainerait machinallement une hausse des infractions. Une « variation […] normale » d’après le chef de la police de Gatineau. Et les policiers réussissent quand même à élucider la moitié des crimes environ.
Ou nos services de police sont-ils plus efficaces? En effet, d’après le maire Pedneaud-Jobin, ils ont simplement été plus présents sur le terrain, ont amélioré leur temps de réaction et la prise en charge des victimes… Et puis les citoyens sont moins réticents à dénoncer les « méfaits sexuels » (sont inclus le voyeurisme, le partage d’images intimes ou la cybercriminalité en plus des agressions); ils les dénoncent davantage.
Alors que penser? Mon impression est-elle fausse? Les médias, qui sont comme une loupe se posant indifféremment sur les petites comme les grandes infractions (certains diraient un prisme déformant), leur culture du sensationnalisme, tout cela en serait-il la cause? Je ne prétendrais pas en tirer une conclusion. En revanche, pour ma part, je ne ressens pas de danger ou d’insécurité en me promenant dans les rues; ce qui n’implique pas pour autant que je laisserais ma fille de 13 ans se promener toute seule après 9 h du soir dans les petites rues…
Je continue de croire que notre société québécoise est pacifique et sécuritaire, non pas à cause d’une présence policière accrue, mais parce que les individus sont plus policés, plus respectueux les uns des autres que dans bien d’autres pays. Et je me rassure un peu plus en remarquant qu’il y a moins d’infractions à la loi au Québec, toutes catégories confondues, qu’en Ontario ou dans les autres provinces.