ÉDITORIAL
Bis repetita placent
Plus on nous fait le coup, plus nous en redemandons! Après les baisses d’impôt, l’an dernier, le ministre Leitao lance le festival des dépenses, le budget prévisionnel 2019, le « budget des moyens retrouvés » selon son patron, M.Couillard. Saviez-vous que la situation économique est vraiment favorable en ce moment? Et non, rien d’électoraliste là-dedans, ce serait cynique. Des élections provinciales dans six mois, vous êtes certains? Et puis, même si on a pris un peu dans le fond des générations — 1,6 milliard, une peccadille! —, soyez rassurés, on continue de rembourser la dette. Mais depuis combien d’années se serre-t-on la ceinture? Le Parti libéral du Québec nous a déjà fait le coup deux fois. Jamais deux sans trois, dit-on…
Alors, comme vous, j’ai quelques doutes. D’abord, rien ne nous dit que le budget proposé – et éventuellement voté – sera appliqué, à cause du contexte mondial (guerres, baisse de la croissance chinoise, etc.) ou continental (ALENA et mesures protectionnistes américaines qui vont ralentir la croissance au Canada). Ensuite, convenons-en, les libéraux sont désespérés : moins de 30% des intentions de vote à six mois des élections, c’est le pire score des vingt dernières années. Le PLQ n’a pas grand-chose à perdre ; autant distribuer à TOUT LE MONDE, comme dans les tournois des jeunes enfants où tous les participants gagnent une médaille! C’est pas beau? On le sait, c’est une stratégie électorale systématiquement utilisée par l’équipe Couillard. Depuis quinze ans qu’ils sont au pouvoir quasiment sans interruption, ils ont fait le coup à chaque fois : deux ans de coupes budgétaires, un an de valse-hésitation, un année de bonbons fiscaux ou autres… Puis, dans deux ans, parce qu’on aura trop dépensé, qu’on vivra au-dessus de nos moyens, il faudra retourner à la rigueur financière, à l’orthodoxie économique.
Le flou est tel quant à la date de disponibilité de l’argent ou de sa destination exacte que, dans nombre de domaines, il y aurait matière à discussion. Quelques exemples : les 8 % d’impôts des PME baissés à 4 %, qui semblent aider notre tissu économique, mais est-ce vraiment pour toutes les PME? 500 millions pour la future politique culturelle, mais sans plus de précisions, et sur cinq ans, est-ce de la poudre aux yeux? En infrastructure, des plans qu’il faut répartir sur plusieurs années, dans plusieurs régions, cela dépend-il des circonscriptions en danger d’être perdues? La liste est longue.
En fin de compte, derrière tout cela, une seule vérité, une seule idéologie (néo-libérale), celle d’un parti qui est plus proche des conservateurs que des libéraux fédéraux. Pourquoi aurait-il changé soudainement de valeurs? Le rôle de l’état, l’environnement, la santé et l’éducation, les transports, la famille, etc. L’ajout d’infirmières et les consultations à domicile? Ce sont eux, les bons docteurs, qui ont coupé là-dedans! Augmenter le crédit d’impôt des usagers des garderies non subventionnées au nom du libre choix? Belle manière de torpiller les CPE accessibles à tous, qui servent aujourd’hui de modèles dans le reste du Canada!
De surcroît, en Outaouais, il suffit de brandir le spectre de la souveraineté ou du « nationalisme ethnique » (néologisme attribué dernièrement par les libéraux à François Legault) et immédiatement, l’électeur rentre dans le rang. L’Outaouais a une mentalité de parti unique. Parier sur notre crédulité quant à la bonne foi du gouvernement actuel me pousserait presque à voter pour la CAQ… Je blague : elle peut difficilement promettre mieux dans les circonstances, et les deux formations ne sont-elles pas « bonnet blanc et blanc bonnet » en matière d’économie, la seconde tenant en plus d’un certain conservatisme social?