LETTRE
Campagne électorale : facturation réciproque des services médicaux
Une de principales propositions de la CAQ consiste à rouvrir le contrat signé avec les spécialistes du Québec et à réduire les revenus de chaque médecin d’environ 80 000 $. La Dre Diane Francoeur, présidente de la FMSQ, a déclaré que les patients ont désormais un meilleur accès aux anesthésistes dans les régions et que les médecins prévoient prolonger leurs heures de service pour l’imagerie médicale en milieu hospitalier.
La position de la CAQ est, au nom de la « transparence », de publier les noms des 100 médecins dont la facturation est la plus élevée. Comme l’a écrit l’ancien président de l’Association médicale de l’Ontario, le Dr Shawn Whatley, « lorsque le gouvernement impose un prix bas à un service médical, cela ne veut pas dire que les patients obtiendront le même service médical que si le prix avait été différent. Si les médecins ne peuvent pas se permettre d’offrir tous les soins qu’ils souhaiteraient pour X, alors ils procéderont à des ajustements. Ils raccourciront le temps des visites et réorienteront plus souvent les patients, ou ils choisiront de voir d’autres patients. »
S’il est vrai que les revenus bruts des médecins du Québec ont finalement dépassé légèrement la moyenne des autres provinces, il convient de rappeler que, jusqu’à tout récemment, ils étaient les plus bas du Canada. Il y avait plusieurs effets prévisibles. Les vastes régions frontalières de l’ouest du Québec ont eu de la difficulté à attirer des spécialistes et des médecins de famille, ce qui était en partie dû aux honoraires plus bas que ceux proposés en Ontario et au financement insuffisant des établissements de santé. Une récente étude de l’IRIS a suggéré que le financement des soins de santé de l’Outaouais était inférieur de plus de 250 millions de dollars par an par rapport à celui des régions de taille similaire ailleurs dans la province. Cela a poussé bon nombre de patients à se faire soigner à Ottawa, à Pembroke et à Hawkesbury.
Cependant, en raison des faibles honoraires payés par le gouvernement du Québec, peu de médecins de la vallée d’Ottawa accepteraient une carte d’assurance maladie du Québec à titre de paiement intégral. Les patients traités de manière élective ou ceux ayant développé une maladie inattendue lors d’un voyage d’affaires ou pendant leurs vacances devraient payer leurs soins de leur poche et attendre un remboursement partiel.
Le Québec a refusé de signer l’Entente de facturation réciproque des services médicaux (RMB) et le gouvernement fédéral a ignoré sa violation de la Loi canadienne sur la santé. Pendant des années, j’ai pensé que la seule solution pour le gouvernement d’Ottawa était de payer directement les médecins pour les soins prodigués à tous les patients hors province.
Une fois la parité des honoraires obtenue pour les médecins du Québec, j’avais le sentiment qu’une solution plus simple serait que le Québec signe l’entente sur le RMB. Le premier ministre Philippe Couillard n’a pas encore émis de commentaire quant à son éventuel accord sur le sujet.
Si la CAQ remporte les élections et applique les réductions d’honoraires, cette mesure rétrograde réduirait les chances du Québec de signer l’entente sur le RMB. Cependant, ses conséquences à long terme ne seraient pas confinées à l’ouest du Québec; tous les Québécois resteraient des citoyens de deuxième classe lorsqu’ils voudraient se faire soigner ailleurs au Canada.
Espérons que le premier ministre Philippe Couillard promettra, s’il est réélu, de signer l’entente sur le RMB et qu’il laissera un héritage de soins de santé transférable partout au Canada à tous ses concitoyens québécois.
Charles S. Shaver, MD
Ottawa