ÉDITORIAL
L’union fait la force
La semaine dernière, nous avons assisté à un épisode malheureux de plus dans la vie politique québécoise : le refus de Québec Solidaire de soutenir un pacte électoral avec le Parti Québécois (s’effacer au profit du candidat le mieux placé).
Les raisons? Principalement, garder une certaine « pureté » dans l’approche et le contenu politique proposés. En d’autres termes : QS a peur de perdre son âme. QS et le PQ, ce n’est pas la même chose, voyons! QS ne s’allierait pas à un parti qui repousserait la question de la souveraineté aux calendes grecques ou qui promouvrait les énergies fossiles, directement ou indirectement.
En même temps, il s’agit de politique… plus exactement d’un pari politique. En effet, QS sera-t-il en mesure d’éviter la réélection du Parti Libéral, alors qu’il n’a jamais réussi à faire élire plus de deux députés jusqu’à maintenant? Les délégués du quatrième parti au Québec pensent-ils pouvoir offrir en l’espace de deux ans un programme susceptible d’enthousiasmer soudainement une population majoritairement de droite? Sachant que les anglophones, les minorités culturelles et religieuses ou que des régions entières (comme la nôtre) votent quasi automatiquement pour le PLQ. Sans compter l’obstacle que constitue la Coalition Avenir Québec, parti à ne pas négliger qui a le vent en poupe en ce moment?
QS semble oublier deux variables : 1. Le PLQ exploite la division des partis souverainistes, dits « de gauche », depuis longtemps en toute impunité; cela fonctionne et lui laisse les coudées franches pour déconstruire au fil des années tous les acquis de la Révolution tranquille (en partie initiée par ce même Parti Libéral, dans les années 1960). 2. Faire de la politique, c’est être parfois pragmatique: on est plus fort ensemble que seul; même si QS gagnait progressivement les votes, combien de mandats avant que qu’il puisse vraiment rivaliser avec le PLQ et le vaincre?
Sérieusement, j’hésite à qualifier cela d’aveuglement politique ou d’idéalisme têtu. Probablement des deux. Le système électoral actuel favorise non seulement le parti au pouvoir, réduit la proportionnalité du vote à sa plus simple expression, mais en plus, culturellement parlant, sous l’influence anglaise, le paysage politique, québécois, canadien et même américain, reste toujours simple : nous avons le choix entre deux partis. Nous aimons ça nous, nord-américains, avoir à choisir entre deux grands partis, deux grandes idéologies. Cela ne doit pas être trop compliqué.
Donc croire qu’une gauche nationaliste scindée en trois partis pourra un jour rivaliser avec le PLQ et briser ce schéma est utopique. Désolé pour la CAQ, qui a souvent la préférence dans les sondages comme opposition officielle… Jusqu’au vote! À moins d’un grand bouleversement, qui n’est jamais arrivé jusqu’à aujourd’hui, et cela malgré le scandale des commandites, la commission Charbonneau, le printemps des Carrés rouge, une politique réelle encore trop timide face aux enjeux environnementaux, pour ne pas dire anti-environnementale (pensons à la loi sur les mines ou aux subventions à des cimenteries) et encore aujourd’hui à une collusion chronique entre l’appareil du PLQ et la grande industrie ou les firmes d’ingénieurs.
Mais, tous les autres partis, qui réclament plus de proportionnalité, afin d’être représentés à la hauteur du nombre de voix qu’ils recueillent lors des différents scrutins, ne sont pas capables de faire des concessions, de s’associer dans le but commun de sortir le PQ du pouvoir! Voyons cela, devinez ce qu’une partie de leurs sympathisants pourraient faire? Continuer de voter pour les deux gros partis qui ont le plus de chances d’être élus et ont l’expérience du pouvoir. Ce ne serait pas l’effet inverse de ce à quoi s’attend QS?