ÉDITORIAL
La ruée vers l’ouest
Je suis admirateur de films westerns. C’est peut-être l’une des raisons qui m’ont amené en Amérique du Nord… Cependant, si nous ne vivons pas dans l’Ouest sauvage, certains aspects de notre vie sont tout aussi « sauvages ». Comme le développement domiciliaire. Il y a peu je discutais avec des amis du « village urbain » à construire au plateau, tout en pestant contre la surpopulation forcée à l’école secondaire Grande-Rivière, par manque de planification stratégique de la ville et de consensus avec la CSPO. L’école ne verra pas le pas le jour avant la rentrée 2020.
Parallèlement, nous apprenons avec plaisir que le Conseil municipal a voté pour le train léger sur l’axe est-ouest (les transports automobile et en bus étant saturés à moyen terme) et pour la reconstruction d’une bibliothèque sur la rue Principale. Autant de nouvelles qui ont et auront un véritable impact sur notre vitre quotidienne… d’ici 5 à 15 ans.
Pour mémoire, le schéma d’aménagement de la ville prévoit que le nombre de logements construits soit le double à Aylmer que dans l’est d’ici à 30 ans! On parle là de près de 3500 nouvelles habitations du côté du chemin Boucher, auxquelles d’ajouteront celles du Vieux-Aylmer et puis plus loin, le long du Boulevard St-Raymond. Surtout du résidentiel, à raison de 40 logements à l’hectare. Si l’on met de côté la situation du transport (la « mobilité »), qui sans être réglée devrait s’améliorer à terme, notre vie se résume-t-elle à dormir, aller travailler, revenir du travail et se coucher?
Après avoir détruit tout le tissu commercial de proximité depuis deux générations, pour le plus grand profit de zones commerciales franchisées, placées aux 5 km et qui se ressemblent toutes, certains constructeurs feignent de redécouvrir les vertus de la vie communautaire près de chez soi avec la bénédiction de la Municipalité. Le « village urbain »! Quelle idée géniale, après 30 ans de fusion, qui ont vu justement disparaître les villages!
Plus sérieusement, voilà deux semaines je lisais un numéro spécial de Courriel international et encore plus récemment un article dans le Devoir qui présentait la ville de Grenoble comme audacieuse et avant-gardiste. J’en ai retenu quelques petites choses pour nous, Aylmerois.
D’abord que pour bien vivre en ville, il faut autre chose que des logements proches de chez soi : salles communautaires, petits commerces (alimentation, vêtements, bricolage, etc.), mais aussi espaces publics (jardins, places, terrains de sport), tout cela accompagné de mesures drastiques anti-voitures (limitation de la vitesse, piétonnisation des rues, construction de vraies pistes cyclables, non « partagées », gratuité des transports publics). Oui, vous avez bien lu : nous sommes loin du compte pour l’instant. C’est pourtant l’ambition que nous devrions garder en ligne de mire, pour des raisons de santé autant qu’environnementales, sociales ou économiques. Ce ne sont pas les voitures qui vivent en ville, mais bel et bien un tissu interrelié d’êtres humains. En vérité, tout est lié.
Serait-il insensé de repenser notre ville jusque dans la conception des maisons ou appartements (créativité, ouverture sur l’extérieur, coopération); où la rue deviendrait espace de déplacement, de repas, d’agriculture ou d’art; nos quartiers retrouveraient une identité propre? Une ville organisée comme Santa Cruz (Tenerife) autour d’un lieu culturel, sa bibliothèque polyvalente ouverte 24 h sur 24 h?