Les médias écrits en arrachent
La situation actuelle en Outaouais et à la grandeur du Québec
Les journaux papier, quotidiens et hebdomadaires, en Outaouais vivent des moments difficiles depuis plusieurs années. Partout au pays, les médias n’hésitent pas à décrire la situation de « réelle crise ». L’année 2018 ne fut pas une exception. La Gatineau ainsi que le Gatineau Express ont tous deux fermé boutique.
La Gatineau avait dû arrêter les opérations « dues aux coûts d’opération qui n’ont cessé d’augmenter ces dernières années », avait dit la direction. Une autre raison fut la baisse constante des revenus publicitaires.
C’est le 5 septembre que le Gatineau Express, mieux connu sous le nom de La Revue, a publié son dernier journal après 59 ans d’existence. Pour corriger sa situation financière à court terme, Transcontinental avait vendu le journal à Lexis Media. Desservant la plupart des foyers de Gatineau, l’hebdomadaire offrait l’exemplaire du journal à plus de 90 000 familles.
Confronté à des difficultés financières, le média anglophone West Quebec Post a dû changer sa façon d’opérer. Depuis le mois d’août, le journal livre seulement à ses abonnés en ne donnant plus des copies gratuites. Auparavant un hebdomadaire, le journal papier publie maintenant une édition toutes les deux semaines.
L’équipe du Bulletin d’Aylmer fait une enquête sur son avenir financier depuis quelques mois auprès des résidents du secteur. Le journal avait aussi invité les gens à contribuer avec un « abonnement symbolique ». Peu importe le montant, des dons peuvent également être faits. À ce jour, le journal a reçu une vingtaine d’abonnements symboliques.
Les médias sont unanimes, l’Internet et les réseaux sociaux affectent grandement les médias écrits. Il y a de moins en moins de publicité dans les journaux, ce qui affecte spécialement les journaux indépendants offrant des journaux gratuits.
Pour remédier à la crise, en 2018, le gouvernement fédéral a offert un soutien financier aux journaux. Dans le cadre de son Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 du gouvernement fédéral, un investissement de 10 millions sur 5 ans destiné au Fonds d’appui stratégique a été émis aux médias communautaires. De plus, dans sa mise à jour économique d’automne, le gouvernement fédéral a annoncé des mesures d’allègements fiscaux pour les médias canadiens, totalisant 595M $ sur une période de cinq ans.
Le gouvernement de la CAQ a annoncé qu’il y aura une commission parlementaire sur la crise des médias papier au printemps 2019. Louis Lemieux, ancien journaliste et député de Saint-Jean, sera le président de la commission.
Dans les dernières années, les hebdomadaires et quotidiens ont dû procéder à plusieurs mises à pied du personnel. En 2018, une dizaine d’hebdomadaires ont fermé au Québec. La Presse, le Soleil et le journal Métro sont quelques-uns des quotidiens qui ont dû abolir plusieurs postes en 2018.
Les associations de journalistes inquiètes
Benoit Chartier est président du conseil d’administration d’Hebdos Québec, un organisme à but non lucratif qui promouvoit la presse locale indépendante. Hebdos Québec se consacre à 47 journaux hebdomadaires indépendants francophones au Québec. « On est victime d’une concurrence déloyale et illégale des grands du net puisque ceux-ci ne paient pas de TPS et de TVQ », explique M. Chartier. Hebdos Québec demande l’abolition de la taxe sur le recyclage qui affecte les journaux, une taxe associée à l’imprimerie des journaux écrits. « Un journal représente la culture : on prône la démocratie, on prône la liberté de presse et la liberté d’expression donc on considère que l’on ne devrait pas être taxé », dit M. Chartier. Un autre combat d’Hebdos Québec est les avis publics des Villes. L’organisme croit que les Villes de 5000 habitants et plus devraient avoir l’obligation d’annoncer leurs avis publics dans les journaux. Le projet de loi 122, déposé en 2016 à l’Assemblée nationale, n’oblige pas les municipalités de plus de 5000 habitants à publier les avis publics dans les médias écrits.
Il y a de moins de publicités dans les médias imprimés; c’est particulièrement le cas des fabricants automobiles.
La directrice générale de l’Association des journaux régionaux du Québec (QCNA), Sylvie Goneau, constate qu’il y a une réelle crise; « certains d’entre eux (les membres) ont frôlé la mort l’année passée, si cela n’avait pas été du coup de pouce du gouvernement fédéral par l’entremise du plan d’action pour les langues officielles ». QCNA admet que la situation touche les médias écrits partout au Québec, surtout en situation minoritaire. Selon QCNA, un des problèmes est que les gens s’improvisent journalistes dans l’ère des réseaux sociaux, ce qui nuit à la validité des nouvelles.
L’une des missions de QCNA est de faire du lobbying auprès des trois paliers de gouvernements pour « démontrer l’importance et la valeur » des hebdomadaires.
Pour se rassembler, les médias ont créé la coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec, regroupant 180 journaux québécois.
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) constate que les médias sont « au plein cœur de la crise ». Le président de l’association ainsi que journaliste à CTV News Montréal, Stéphane Giroux, indique que « La seule façon de protéger les emplois de journalistes est à travers une aide gouvernementale ». La FPJQ aimerait être consultée sur la distribution de l’argent octroyé, dans le but de protéger les plus petits joueurs de l’industrie médiatique. Thème qui revient souvent, la perte des revenus publicitaires est un énorme problème pour les médias écrits. « 80% des achats de publicité média se font maintenant auprès de Facebook et Google » qui ne paient pas de TPS et de TVQ, indique M. Giroux.
L’organisme s’inquiète du fait que certaines régions du Québec soient « dépourvues de médias locaux, que ça soit la radio ou un journal local ».