LETTER
LETTRE
Le Canada, de la monarchie constitutionnelle à la démocratie constitutionnelle
C'est une occasion rare pour les Canadiens de décider de l'avenir de leur hiérarchie politique. Veulent-ils continuer à être "gouvernés" depuis l'Angleterre ou veulent-ils que leur chef d'État soit un Canadien ? J'opte pour un Canadien.
D'abord, il s'agit d'institutions, pas de personnalités. ... pas de Charles. Il s'agit de figures de proue de la démocratie canadienne.
Un roi britannique comme chef d'État ne reflète plus la démocratie canadienne, notre État indépendant ou notre diversité ethnique. Comment les nouveaux citoyens peuvent-ils comprendre le Canada s'ils doivent prêter serment d'allégeance à quelqu'un d'Angleterre ? L'utilisation du monarque britannique comme chef d'État empêche le développement de l'identité canadienne. Comme le rapportait l'Association du Barreau canadien (1979), "... si nous voulons promouvoir la confiance, la fierté et le sentiment d'appartenance, le chef d'État devrait être un Canadien".
Nous avons besoin de figures de proue canadiennes qui représenteront les attributs bilingues et multiculturels du pays, seront des modèles pour notre jeunesse et projetteront les valeurs canadiennes sur la scène internationale.
Le monarque britannique devrait rester le chef titulaire du Commonwealth - dont le Canada resterait un membre important. La famille royale pourrait continuer à être invitée à visiter le Canada.
Le gouverneur général devrait devenir notre chef d'État. Ce beau titre descriptif fait partie de la tradition canadienne. Tous les droits de la Couronne au Canada, tant dans la Constitution écrite que par convention, seraient transférés au gouverneur général, ce qui éviterait un débat débilitant sur leur définition.
Il est politiquement utile de maintenir une institution distincte du "chef d'État", qui se distingue du poste de premier ministre en tant que "chef du gouvernement". Le chef d'État remplit également d'autres fonctions, telles que : nommer un nouveau premier ministre en période d'ambiguïté politique ; soulager le premier ministre de nombreuses fonctions cérémonielles ; agir à la fois comme une "présence humiliante" et une caisse de résonance pour le premier ministre ; et rappeler aux citoyens qu'il existe un État qui persiste même s'ils n'aiment pas le parti au pouvoir. Il serait avantageux d'avoir un mandat relativement long, disons cinq ans, renouvelable une fois. L'expérience, la reconnaissance et la sagesse seront importantes.
Les nouveaux gouverneurs généraux ne devraient pas être élus, afin d'éviter les doubles emplois et les conflits entre les fonctions de gouverneur général et de premier ministre.
Comme l'a suggéré un journal, les Officiers de l'Ordre du Canada pourraient faire office de comité de nomination pour une courte liste de candidats. Une nomination provenant de l'Ordre ajouterait du prestige, de la légitimité et du mérite au poste. La liste des candidats de l'Ordre du Canada devrait être soumise à un " collège électoral " - un groupe électoral conjoint fédéral-provincial formé de députés et de membres des assemblées législatives provinciales. L'éventuel gouverneur général devrait être ratifié par les deux tiers de ce groupe pour obtenir un certain degré d'approbation de tous les partis.
Ce nouveau régime, une "démocratie constitutionnelle" plutôt qu'une "république", soulignerait notre tradition d'équilibrer la protection constitutionnelle de "la paix, l'ordre et le bon gouvernement" avec la démocratie populaire "par le peuple".
Ce changement de régime exigera qu'on en soigne les détails -- un processus d'apprentissage national. Les dirigeants canadiens devraient discuter de ces possibilités entre eux. Ni leurs politiques ni leurs idéologies ne sont en danger. Comme je le fais ici, pas de "politicaillerie".
La modification de notre Constitution serait trop longue, trop complexe -- et acariâtre. Mais il n'est pas nécessaire qu'il en soit ainsi. Nos dirigeants politiques pourraient demander à un organisme neutre - disons la Royal Society - de fournir les noms d'une commission d'experts chargée d'examiner cette question, puis accepter de mettre en œuvre ses recommandations. Je le répète : il n'est pas nécessaire de politiser cette question.
En fin de compte, nous serions bel et bien un gouvernement pour et par les Canadiens.
(abrégé sur demande du Ottawa Citizen, traduit)
John E. Trent (ret)
Chelsea