Le chemin d’Aylmer : 175e anniversaire de sa macadamisation en 2025, 1 de 4
Richard M. Bégin
Lorsque Philemon Wright et quelques colons arrivèrent dans le Canton de Hull, en 1800, il n’y avait aucune route à l’ouest des rapides du Long-Sault. C’est essentiellement dans le premier quart du Canton de Hull, les quatre premiers rangs, que s’établit la nouvelle colonie, entre la rivière des Outaouais au sud, la rivière Gatineau à l’est et le Canton Eardley, à l’ouest, et que l’on traça la première route entre les chutes Chaudière et le lac Chaudière (Deschênes de nos jours), soit le chemin d’Aylmer.
En 1824, Philemon Wright déclara qu’il avait déjà construit 31 milles de chemins, et le chemin d’Aylmer (d’abord décrit comme le « Main Road » ou « Chemin principal », puis désigné sous le nom de « chemin Britannia ») fut l’un des premiers à être complété. En 1802, on avait terminé la section entre les chutes Chaudière et le lot II-14, soit jusqu’au chemin Rivermead qui descendait alors jusqu’aux rapides Deschênes. En 1805, on s’était rendu jusqu’au lac Chaudière.
Pendant des siècles, autochtones, missionnaires, militaires, explorateurs s’étaient servis de sentiers qu’ils devaient emprunter pour éviter les chutes Chaudière, les rapides Chaudière (en face du parc Brébeuf) et les rapides Deschênes. Ce sont ces sentiers qui furent plus ou moins à l’origine du chemin d’Aylmer. Mais il faut remettre les choses en perspective. Comme l’explique un biographe de Wright, Joseph Tassé, « Wright fit passer la charrue de chaque côté du chemin, puis la terre ainsi enlevée servit à son nivellement, les ondulations du terrain furent ameublies, les endroits bas comblés; des ponts furent construits à certaines places et on empierra le chemin lorsque cela fut nécessaire. ». En somme, il s’agissait de routes bien rudimentaires et, en 1819, le « chemin Principal » aurait été en si mauvais état que Lord Dalhousie, gouverneur du Bas-Canada, aurait préféré sauter les rapides.
Lorsque Charles Symmes, neveu de Philemon Wright, fut envoyé en 1821 à la Ferme Chaudière (celle près du lac Chaudière) pour y remplacer son cousin Philemon fils, récemment décédé dans un accident à la hauteur de Grenville, il ne tarda pas à faire sa marque.
Dès 1823, il emprunta de l’argent à son oncle pour acheter le lot II-21 (200 acres jusque-là réservés à la Couronne) et une pointe de terre aux abords du lac, et il entreprit de subdiviser son terrain pour accueillir des colons. Il réussit si bien qu’en 1825, l’arpenteur général du Bas-Canada, Joseph Bouchette, établit que le « village » ou centre administratif du canton serait à cet endroit plutôt que près des chutes Chaudière où Philemon Wright s’était établi. Irrité, Wright exigea de Symmes qu’il le rembourse immédiatement, ce que fit ce dernier. En 1831, le lot II-21 accueillit donc le Bureau d’enregistrement et, en 1842, il obtiendrait le premier palais de justice à l’ouest de Montréal (sur la rue Court). Parallèlement, en 1831, Symmes construisit un hôtel sur les berges du lac Chaudière et, un an plus tard, il lança le premier bateau à vapeur en amont des chutes Chaudière, le Lady Colborne. Dès lors, le « village » se développa rapidement : les voyageurs descendaient de bateau au pied des chutes Chaudière, empruntaient une calèche ou une diligence qui remontait le chemin Britannia jusqu’à un hôtel à Aylmer, y passaient la nuit et prenaient un autre bateau vers l’ouest au quai à proximité de l’auberge Symmes. Avec l’arrivée du Bureau d’enregistrement puis de la Cour, vinrent les avocats, notaires, juges et fonctionnaires. Les gens d’affaires, notamment les barons du bois, s’établirent le long du chemin Britannia. On construisit des scieries, des moulins à farine... et d’autres hôtels, dont le British (auberge Conroy).