LETTRE
Le sort de la Tourterelle triste est entre nos mains
Le Service canadien de la faune (SCF) vient d’admettre la chasse à la Tourterelle triste au Québec, dès septembre 2016, sous prétexte que les populations y sont assez abondantes et il conclut : Il n’y a pas lieu de se préoccuper sur les plans biologiques et scientifiques de la viabilité d’une chasse à la Tourterelle triste au Québec.
Le SCF fait une piètre analyse dans ce dossier, son travail de calcul est bâclé et mêmes ses maigres chiffres sont contestés. Mes questions au SCF: qu’en est-il des toutes aussi importantes données auxquelles mène l’hémisphère droit, ce site de la perception globale? Quand est-il des valeurs, des sentiments, des croyances, et des émotions des Québécois, qui résident à Gatineau, dans le Pontiac, à Chelsea, à Mont-Laurier, dans les Laurentides, à Montréal, à Trois-rivières, à Québec, en Beauce et en Estrie face à la chasse à ce bel oiseau dans notre voisinage?
Pourquoi vouloir tuer des tourterelles?
Les chasseurs souhaitent chasser la Tourterelle pour deux raisons: parce que ce type d’activité serait excitant et pour initier les plus jeunes à ce sport. Sacré belle éducation à la nature.
Si la Tourterelle triste, qui se trouve sur notre territoire à sa limite nord, a réussi à s’établir chez nous (après les années 1920) malgré qu’elle craigne le froid, c’est en partie parce qu’elles vient à nos mangeoires dans un Québec où l’ornithologie est en pleine croissance. Je ne nourris pas ces magnifiques oiseaux dans ma cour pour fournir une cible aux hurluberlus qui souhaitent s’amuser à leur tirer dessus.
Avant de trancher face à cette demande singulière de la part de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, il fallait que le SCF prenne en compte le spectre entier des données; il fallait que les analystes travaillent non pas avec une seule, mais les deux parties de leur cerveau. Ils auraient ainsi pu profiter d’une kyrielle de nouvelles données pertinentes, notamment: le bonheur que procure l’observation d’un couple de tourterelles à la saison des amours, la joie éprouvée à la vue d’un de leur nid occupé, le plaisir ressenti, lorsque au jardin, le sifflement des ailes de l’une d’elle annonce l’arrivée à la mangeoire ou à la fontaine, la sérénité qu’apporte dans le quartier la vue d’une ou deux de ces belles colombes sur un fil. Mais aussi, si le SCF avait tenu compte de notre capacité d’émerveillement sans cesse renouvelé quand, au crépuscule ou à l’aube, le chant plaintif et doux de la tourterelle vient nous rassurer en dépit des folies du monde, plutôt que d’approuver cette demande insensée, il aurait certainement chercher des façons nouvelles de la protéger.
Le hic pour nous et notre Tourterelle au Québec, c’est que ces données n’entrent pas dans des courbes ni des graphes et ça, c’est bien achalant pour la science.
Si comme moi vous êtes à côté de vos pompes par cette atteinte dans notre propre cour, contactez votre député fédéral et osez exiger que le SCF considère les gens en chair et en os qui habitent dans cette province et exigez qu’il fasse volte-face. On est au Québec ici, pas au pays de Donald Trump. Dans ce dossier d’une tristesse inouïe, quelqu’un va pourtant finir par entendre raison.
Claire Charron
Gatineau (sect. Aylmer)