ÉDITORIAL
Les Cowboys fringants : un monument national
Éclaircissons tout de suite un point : je ne suis pas un fan inconditionnel des Cowboys fringants, qui connaitrait tous leurs albums, toutes leurs chansons par cœur et/ou qui irait à tous leurs concerts dans la province. Je les ai vus trois fois dans les dernières années et chaque fois lors de l’Outaouais en fête… comme dimanche soir dernier. Et ce fut encore une fois (ou plus que jamais) incroyable, à plusieurs égards !
Peu avant, l’un de mes amis, qui devait m’accompagner au parc des Cèdres, m’avait décrit comment le groupe québécois allait le chercher profondément avec ses mélodies entrainantes et ses textes puissants. S’il est vrai que certains morceaux sont des ballades, beaucoup suivent un irrésistible et endiablé rythme, parfois même sur des paroles tristes, voire déprimantes… quelle que soit la catégorie dans laquelle on veuille les faire rentrer (folk ? Country québécoise ? Rock folk ?), on peut aisément faire la fête sur les Cowboys ! Leurs mélodies, où les guitares le disputent aux percussions, aux cuivres ou aux vents et aux cordes (surtout au violon), nous restent longtemps en tête…
Toutefois, dimanche soir, et bien que certains puissent me rétorquer qu’après tout il n’y avait que les supporters inconditionnels qui avaient fait le déplacement — ce dont je doute — ce que j’ai vécu allait au-delà de ça. Certes, ce sont de grands professionnels qui tournent au Québec, au Canada et partout dans la francophonie internationale depuis plus de 25 ans ; ils jouent très bien, en parfaite harmonie musicale à l’intérieur du groupe, ont un jeu de scène de fou, savent mettre le feu au parterre et enchainer les titres. Mais il y a plus.
Les paroles de leurs chansons sont vraies, elles touchent. Les jeunes, les moins jeunes, les plus vieux ; leur auditoire foule est intergénérationnel. Donc, pour reprendre la formule de mon ami, leurs paroles vont chercher le ou la Québécoise en faisant référence à des tranches de vie, à des éléments culturels (personnes, événements) typiques, dans un langage à la fois familier et poétique, avec un sens de la formule hors pair. Leurs titres ou refrains sont emblématiques, au point que si devais si citer un, je devrais en ajouter trente ! Ils m’ont même inspiré en 2007, lorsque j’ai mis en place le programme de rugby à l’école secondaire Grande-Rivière et cherché une devise : « Droit devant ! ».
Ceci dit, est-ce que toutes leurs chansons sont compréhensibles par tous, même sans avoir vécu au Québec ? Peut-être pas toutes. Cependant, la plupart d’entre elles, véhiculent un message universel, parce qu’elles abordent des expériences humaines fondamentales. C’est ça qui est également fort : comment aller chercher l’universel à travers l’anecdotique. Avec leurs 17 albums, les Cowboys fringants illustrent plus que jamais l’âme du Québec : un esprit festif, ouvert, bonhomme, un brin nostalgique, mais très lucide sur l’état de la société et farouchement indépendant. Une voix singulière dans une Amérique à la culture très états-unienne et anglo-saxonne, envahissante et uniforme. Comment ne pas se sentir un peu plus québécois après les avoir écoutés ? Je me demande si les Anglo-Québécois ressentent les mêmes émotions à les entendre ou encore s’il existe l’équivalent en anglais ; et si non, pourquoi. Merci Karl, Jean-François, Marie-Annick, Jérôme, Dominique et les autres, vous faites partie d’un patrimoine québécois bien vivant !