Les femmes remarquables d’Aylmer
Lucy Faris (1855–1924)
Lucy Faris nait à Aylmer en 1855 d’une des premières familles à venir s’installer dans ce village. Son père, John Faris, était vraisemblablement cultivateur et sa mère s’appelait Mary Benedict. Ils eurent onze enfants. Dès son jeune âge, Lucy aime lire, écouter de la musique, pratiquer des jeux, faire de la broderie, du crochet, du dessin, etc. Elle rêva toute sa vie de créer un établissement éducatif et culturel pour le bien de chacun des habitants d’Aylmer, grands ou petits, qui pourraient avoir la chance d’apprendre et de se divertir. Cette bienfaitrice qui a toujours habité Aylmer apporta sa contribution en léguant, à son décès en 1924, les actifs d’un fonds à son nom, « LucyFaris », pour ouvrir une bibliothèque et donna aussi toute sa collection personnelle, qui comprenait deux cent vingt livres ainsi que des périodiques, des jeux, des œuvres d’art et des disques. C’est sa vision et son esprit communautaire qui ont mené à l’inauguration de la première bibliothèque d’Aylmer en 1938. En mai 2004, la Ville donna son nom à une nouvelle bibliothèque, qui occupe deux étages de la Place des Pionniers, pour honorer sa mémoire. Jamais on ne pourra oublier le nom de Lucy Faris, une visionnaire, qui faisait valoir l’importance de l’éducation pour tous, selon les intérêts de chacun, dans un lieu communautaire qui s’appellera toujours la bibliothèque LucyFaris du quartier du VieuxAylmer à Gatineau.
Née à Ottawa en 1926, Yvette Bond est passionnée de littérature, de culture française et de découvertes. Pendant quelques années, elle correspond avec un jeune artiste français ayant habité l’Algérie et le Maroc, Pierre Debain. Ce dernier décide de venir s’installer au Canada pour épouser sa douce Yvette, qui a 26 ans à cette époque.
Yvette et Pierre fondent une famille dans une maison patrimoniale du Vieux Aylmer, au 7, rue Front. Dans les années 1970, ils construisent le Centre d’exposition l’Imagier en annexe à la maison avec le bois de la vieille grange qui était derrière et des matériaux recyclés. L’Imagier naît officiellement en 1975. Les expositions qui s’y succèdent se veulent le reflet de l’expression artistique contemporaine régionale dans un lieu éducatif pour Yvette Debain, qui s’emploie à transmettre le plaisir de découvrir des œuvres. Yvette adore animer les visites et faire découvrir aux jeunes publics le sens de l’émerveillement à la vue d’une œuvre picturale ou sculpturale. Elle accueille toujours ses visiteurs avec son sourire légendaire et sa bonté. Elle apprécie le plaisir qu’éprouvent les gens à découvrir des œuvres dans ses locaux à l’Imagier. En 1987, en partenariat avec la Ville de Gatineau, Yvette réalise le Parc de l’Imaginaire, un petit musée en plein air avec ses bancssculptures et sa fontaine japonaise mettant en vedette des musiciens et des professionnels des arts de la scène. Un kiosque accueille les artistes durant la belle saison. En 2005, la Ville décerne l’Ordre de Gatineau à Yvette Debain. Le Centre d’exposition L’Imagier et le Parc de l’Imaginaire vibreront encore longtemps au rythme des prestations artistiques.
Marjorie Davison voit le jour à Aylmer en 1915. Elle fait partie de l’une des familles pionnières de l’endroit. Son arrière-grand-père, James Finlayson Taylor, fut l’un des premiers habitants d’Aylmer et un contemporain de Charles Symmes, fondateur de la ville. En 1921, alors qu’elle n’a que six ans, Marjorie est profondément marquée par le grand incendie qui ravage une grande partie de la ville. Cela explique peut-être sa fascination pour les feux qui a marqué son parcours professionnel! En effet, armée de son appareil photo, Marjorie documente de nombreux incendies. Photographe de talent, elle est une des premières femmes au pays à joindre le corps de presse national, dans les années 1940, alors que ce milieu est encore farouchement masculin.
Dans le cadre de ses fonctions journalistiques, elle interviewe et photographie de nombreuses personnalités politiques ainsi que plusieurs dignitaires de divers horizons. Marjorie acquiert rapidement une certaine notoriété, ses photos étant publiées dans des magazines et des journaux prestigieux, comme le Time, le Mayfair, Life, Saturday Night et le Globe and Mail. La réussite et la pugnacité de cette femme déterminée œuvrant dans un milieu essentiellement masculin inspireront de nombreux articles portant sur sa carrière. Elle finit par réaliser son rêve en créant et dirigeant sa propre agence de presse à Ottawa, le Capital Press Service, qui emploiera six personnes. Passionnée d’histoire et d’antiquités, Marjorie participera aussi à la rédaction d’un ouvrage sur les meubles canadiens avec son mari, Philip Shackleton. Ses archives sont conservées par l’Association du patrimoine d’Aylmer. Elles constituent une précieuse ressource pour la connaissance et l’appréciation de notre histoire et de notre patrimoine régional.
Cette pionnière hors de l’ordinaire figure parmi les bâtisseurs de la région de l’Outaouais. Née en 1816, Mary fait partie des McConnell, une illustre famille qui œuvre à l’exploitation forestière. En 1837, elle épouse Robert Conroy, un ambitieux marchand, avec qui elle aura dix enfants. Le couple s’établit à Aylmer et y fait construire l’hôtel British. Par la suite, les McConnell-Conroy investissent surtout dans le développement des services de transport, comme les glissoires à bois, les quais d’embarquement, le chemin macadamisé d’Aylmer, les ponts et les services de diligence. En 1857, Mary achète la ferme des rapides Deschênes, qui devient l’une des fermes laitières les plus prospères de l’Outaouais.
À la mort de son mari, en 1868, elle prend les rênes des entreprises familiales et elle modernise leur scierie. Plus tard, elle construit une deuxième scierie et y conduit le rail. Ses « moulins à scie » produisent jusqu’à 30 millions de pieds de planches en une saison et emploient 200 travailleurs. Cette effervescence économique permet d’établir les bases du village de Deschênes Mills, en bordure de la rivière des Outaouais. À sa retraite, Mary lègue ses entreprises à ses enfants. Ses fils, Robert et William Conroy, construisent alors une centrale hydroélectrique sur les rapides Deschênes pour alimenter les quartiers environnants, les usines et le tramway reliant Hull et Ottawa à Aylmer. Les fondations du barrage hydroélectrique sont d’ailleurs encore visibles. Le sens aigu des affaires de Mary pourrait faire d’elle une « baron du bois », titre réservé aux hommes à l’époque.