LETTRE
Les pouvoirs des municipalités versus les droits démocratiques des citoyens
La loi 122 du gouvernement du Québec vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale. L’objectif de celle-ci : augmenter les pouvoirs des municipalités et leur autonomie. À priori, c’est une bonne nouvelle; les municipalités ont de plus en plus de responsabilités et leurs pouvoirs devraient donc s’accroitrent aussi.
Un des aspects positifs de cette loi est de permettre aux municipalités de diversifier leurs sources de revenus et ainsi éviter les hausses de taxes foncières récurrentes. Cependant, ce gain de pouvoirs ne doit pas se faire au détriment des droits démocratiques des citoyens. Voici trois points à surveiller.
1. L’abolition des référendums municipaux
Les référendums constituent un processus qui permet aux citoyens d’être consultés directement. Certes, ce mécanisme n’est pas parfait et mérite d’être amélioré pour éviter l’opposition systématique d’une minorité de citoyens. Au contraire, son abolition créerait un déséquilibre pour le citoyen. La loi prévoit qu'une municipalité n'aura plus à se soumettre à l'approbation référendaire en matière d'urbanisme si elle s'est dotée d'une politique de consultation citoyenne. Un cas typique pour Aylmer serait celui du citoyen qui achète une maison dans une rue tranquille et qu’un an plus tard la ville décide de permettre la densification du secteur et d’y approuver la construction massive de condos; le citoyen pourrait difficilement s’y opposer sans référendum. Restera à voir si la Ville de Gatineau se dotera d’une politique de consultation citoyenne.
2. L’attribution des contrats publics
La hausse de 25 000 $ à 100 000 $ comme seuil pour l’obligation de procéder par appel d’offres dans l’octroi d’un contrat n’est pas souhaitable dans toutes les circonstances. En effet, ce seuil n’est pas ajusté à la population de la ville. Par exemple, une municipalité de 1 000 habitants qui aurait plus de 80 % de ses contrats sous le seuil de 100 000 $ pourrait presque toujours procéder de gré à gré pour l’attribution de contrat. Cette mesure est diamétralement opposée aux recommandations de la Commission Charbonneau rendues publiques il y a moins de deux ans. D’ailleurs, l’opposition provinciale n’a pas manqué de marteler que cette loi augmente les « possibilités de collusion et de corruption ». Il restera à la discrétion des municipalités d’adopter un seuil moins élevé que celui proposé par la loi. Aucun engagement pris par la ville de Gatineau en ce sens pour l’instant.
3. L’abolition des avis publics dans les journaux locaux
Le gouvernement permet aux municipalités d’arrêter de publier les avis publics dans les journaux et d’utiliser uniquement l’Internet et les médias sociaux. Je concède que ces avis, dans leur forme actuelle, sont incompréhensibles. Mais une vulgarisation serait plus appropriée qu’une abolition. Les municipalités ont la responsabilité d’informer adéquatement les citoyens, y compris ceux en milieu rural sans accès à l’Internet à haute vitesse et les personnes âgées. Sinon, il en résulterait une vulnérabilité accrue. Certaines municipalités se sont engagées à maintenir la publication dans les journaux locaux, mais ce n’est pas le cas de la ville de Gatineau.
Bref, je garde l’œil ouvert quant à ces aspects.
Audrey Bureau
Candidate, district d’Aylmer