LETTRE
Plaidoyer pour un tabouret
Marchés d’alimentation ou institutions financières, elles y travaillent debout toute la journée. À nous servir rivées derrière leur comptoir ou leur caisse enregistreuse. Je précise «elles», parce que 99% du temps il s’agit de femmes ou de jeunes filles. S’asseoir, ne serait-ce qu’un bref instant ? N’y pensez même pas. Défendu ! Vous avez déjà remarqué un tabouret derrière elles ? Moi pas. Ma sympathie leur est acquise je l’avoue.
Pendant qu’elles s’échinent au boulot, les pieds endoloris, leurs patrons les pauvres, s’ils ont le tibia fatigué, ont tout le loisir de poser leurs fesses dans un fauteuil confortable. Prenez un gérant de banque : le bonhomme sitôt qu’il vous aura fait entrer dans son bureau aura vite fait de s’asseoir en vous invitant à faire de même. Ces mêmes hommes, bureaucrates dans l’âme, me rétorqueront vite fait : «Mais, Monsieur, elles sont là pour donner un service à la clientèle». Ou mieux : «Monsieur, c’est la politique de la maison mère qui veut qu’elles travaillent debout. Je ne peux rien y faire.»
Réponses de Ponce-Pilate. En quoi est-ce que cela dérangerait si une préposée vous accueillait assise sur un tabouret pour répondre derrière son comptoir ? Pensez-vous que sa position assise amenuiserait la qualité de son service, pâlirait son sourire, réduirait son efficacité ? Quant à l’excuse des directives venues d’en haut, tu es gérant ou directeur, à toi de mettre tes culottes ! Les directives bébêtes, stupides, tu les ignores. Et surtout, surtout, tu prends soin de ton personnel. Une question de considération : tu lui procures les fameux tabourets. Un tabouret, ça aussi c’est un outil de travail. Au même titre qu’une caisse enregistreuse ou un ordinateur.
Que je sache l’esclavagisme a été aboli de longue date au Canada. Il serait temps que certains employeurs allument.
Francois Brisebois
Aylmer / Gatineau