ÉDITORIAL
Trudeau et le pétrole (1) ou comment renier sa plateforme électorale
Le sommet du G7, les élections provinciales ontariennes, la hausse des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium canadiens… Il est facile de se laisser divertir ! Concentrons-nous plutôt sur la décision du gouvernement Trudeau d’acheter le pipeline Transmountain.
D’abord, il faut savoir qu’à l’échelle planétaire, contrairement à ce que veulent nous faire croire les pétrolières et certains écologistes, les hydrocarbures ne risquent pas de manquer tout de suite. Selon une étude menée en 2017 par la British Petroleum, il y aurait deux fois plus de réserves de brut récupérable que la demande d’ici à 2050.
Depuis le premier choc pétrolier (guerre du Kippour, 1973), c’est l’organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), qui inclut notamment l’Indonésie, le Vénézuela, l’Iran et le Nigéria, qui dicte ses prix. L’Arabie saoudite en tête. Les compagnies qui extraient et transforment l’or noir suivent, essayant à leur tour de faire un maximum de profit sur notre dos. Toujours avec le même message : c’est une ressource qui se fait de plus en plus rare, alors il faut l’économiser : normal qu’elle soit plus chère…
Autre écran de fumée : la théorie du « peak oil ». Élaborée par des analystes économiques du Club de Rome qui étudiaient les limites de la croissance, elle avance que le prix du pétrole va augmenter jusqu’à atteindre un pic, puis subitement et définitivement dégringoler. Or, comme un mirage, chaque année, les spécialistes repoussent l’atteinte de ce sommet. Envers et contre la logique évidente qu’un jour ces ressources seront épuisées! Le problème est en effet que l’on ne connaît pas l’état des réserves, particulièrement au-delà de 5000 m et les techniques de prospection et d’extraction ne cessent d’évoluer. Et c’est sans compter sur les réserves de pétrole et de gaz non-conventionnels, tel le schiste.
En fait, depuis 40 ans, le croirez-vous, à cause de tout cela, nous économisons le pétrole. Nous explorons sans cesse de nouvelles régions pour trouver de nouveaux gisements, nous inventons des procédés d’économie d’énergie, faisons de la recherche/application autour des énergies vertes, et mettons en place des politiques et des tarifs afin de réduire la fameuse « facture énergétique »… Ironiquement, cela ne fait que repousser l’instant où les stocks seront vides. Dès lors, gardons notre mode de vie et de (sur)consommation!
Cependant, les dirigeants saoudiens, visionnaires, ont compris que cela changeait, que la demande pouvait baisser, que l’on entrait progressivement dans une ère post-pétrole. Certaines réserves sont en effet non-récupérables et la tendance vers les énergies renouvelables est irréversible. C’est un fait reconnu. Dès les années 2000, ils se penchèrent donc sur la situation. Leur premier réflexe? Hausser les prix pour en profiter tant que c’était possible. Puis, après réflexion, sortir le pétrole qui se trouvait sous leur pied au plus vite et réinvestir ailleurs, le meilleur moyen étant de la maintenir à un prix abordable et idéalement moins cher que celui de schiste (américain), soit aux environ de 50 $ le baril… Dans ce contexte, tout hydrocarbure plus cher, comme celui des sables bitumineux, aurait peu d’avenir à terme. Admettons-le une bonne fois pour toutes : le pétrole est une ressource non essentielle, c’est-à-dire substituable. Faisons confiance au génie humain pour lui trouver un remplaçant! Suite de la leçon d’économie générale la semaine prochaine.