LETTRE
Approche positive requise, M. Perreault
Vu le manque de détails parmi les accusations et complots décris dans la lettre au Bulletin (17 août) de M. Jean-Paul Perreault d'Impératif français, j'ai décidé de voir ce qui soulevait sa colère.
J'ai découvert que notre Premier Ministre a demandé au Ministre de la Justice d’établir un nouveau standard de « bilinguisme fonctionnel » pour tous nouveaux juges de la Cour Suprême du Canada, une norme qui n’a jamais existé auparavant. Dans une entrevue, Mme Wilson-Raybould a défini le bilinguisme fonctionnel comme étant la capacité de comprendre les preuves orales et écrites dans les deux langues sans l'aide d'une traduction. Elle indique que la capacité de converser dans les deux langues serait considérée comme un atout, mais pas obligatoire.
Selon M. Perreault, ceci est une « manipulation politicienne » pour « confirmer le suprémacisme anglophone canadien et inférioriser les francophones! ». Il dit aussi que la ministre planifie d’installer ce critère à travers la fonction publique fédérale, réduisant le standard actuellement en place, malgré le fait que je n'ai pu trouver aucune indication de ce plan - une extrapolation un peu dystopique, je crois.
En réponse à « cet affront au Québec, à la francophonie et aux droits à l'équité », M. Perreault suggère que tous les francophones du Canada devraient refuser de parler anglais.
Comme on dit en bon français... « Whoa là, calme té nerfs! »
Je suis francophone. Je suis fier de ma langue et de ma culture. Si mon voisin choisit de pratiquer une culture différente de la mienne, ceci ne m'enlève exactement rien. Je ne sens aucun besoin de lui empêcher quoi que ce soit. Et ce n'est certainement pas un commis qui me sert en anglais qui va ruiner ma journée.
Nous sommes francophones dans un pays majoritairement anglais, c'est une réalité. Nous sommes aussi francophones majoritaires dans notre province, mais avec des communautés minoritaires significatives. Je crois sincèrement que la combinaison de ces expériences nous oblige de maintenir l'exemple. Il est complètement irraisonnable de s'attendre à ce que les autres fassent ce que vous n'êtes pas vous-même prêt à entreprendre. Dire qu'il est nécessaire de sacrifier notre culture pour en accommoder une autre, c'est tout simplement un manque d'imagination et de volonté.
Moi, je n'ai pas besoin de gens qui prétendent représenter les communautés francophones, mais qui finalement ne cherchent que la prochaine chicane. Les médias donnent trop souvent la place à celui qui crie le plus fort, mais comme francophone je vous assure que vos propos me fassent très honte. Vos paroles et méthodes vont à l'encontre des valeurs que vous prétendez protéger, et vous dépensez vos efforts à nous faire passer pour des anxieux, des xénophobes et des intolérants. Moi, je n'ai pas peur de perdre mon français, aussi longtemps que je l'utilise. Et je n'ai pas besoin de piétiner les autres pour le protéger et le promouvoir.
Il faut reconnaître le progrès, M. Perreault. Il faut aussi l’applaudir même si ce n’est pas tout ce que vous auriez personnellement désiré. En tendant le bras à ceux que vous prétendez être vos ennemis, peut-être allez-vous découvrir qu’il n’y a pas autant d’ennemis qu’on ne le croyait.
Daniel Saumure
Aylmer