ÉDITORIAL

L’obsession des armes, l’obsession de s’entretuer

 

Ce n’est pas le premier peuple à afficher la folie de s’autodétruire. Certains peuples sont encore plus remarquables à cet effet. Ce qui est toutefois particulier aux Américains, c’est cette propension à tuer avant tout leur progéniture. Il ne se passe désormais plus 6 mois sans qu’un massacre se produise dans une école américaine. Il est vrai que ce sont habituellement des jeunes qui tuent d’autres jeunes. Toutefois, on ne peut ignorer la participation tacite des adultes qui continuent, en dépit de toute logique à appuyer obstinément le droit de posséder des armes à feu de plus en plus létales.

 

Il y a 300 millions d’armes à feu en circulation aux États-Unis. C’est presque une arme par citoyen, tous âges confondus. Chaque année plus de 3 000 enfants sont tués par des armes à feu. Dans la dernière décennie, il y a eu une augmentation de 600 % de décès par armes à feu. Suite à la tuerie de Newtown où 20 enfants ont trouvé la mort, les armuriers ont connu des records de ventes. La population se précipitait dans les magasins pour acheter des armes d’assaut, craignant que le gouvernement légifère pour en limiter l’accès.

 

Ces chiffres pourraient même être une sous-estimation, car plusieurs États sont réticents à tenir des statistiques sur les morts par armes à feu. La NRA, l’association américaine militant pour le droit au port d’armes, contribue à la caisse électorale la moitié des membres du Congrès en échange de leur appui à la libre circulation des armes à feu. Il n’est alors pas surprenant que le Congrès ait voté une loi interdisant les subventions à toutes recherches voulant analyser les conséquences de la culture des armes aux États-Unis, l’argument étant que les résultats risquent d’être utilisés dans une propagande anti-armes. C’est ni plus ni moins que de se bander volontairement les yeux. Ignorons le problème le plus longtemps que nous le pourrons.

 

Pourtant, les études sur ce sujet démontrent clairement que plus il y a d’armes à feu dans la population, plus il y a de décès accidentels et d’homicides liés aux armes. Vous me direz que c’est une vérité de La Palice. Pas pour les Américains. Il y a un important phénomène de dénis chez eux. Même lorsque leurs propres enfants sont tués, les Américains semblent justifier l’accident par des causes autres que les armes elles-mêmes.

 

Une nouvelle technologie a été développée par certains armuriers pour que les armes puissent tirer uniquement lorsqu’elles sont utilisées par leur propriétaire. Bill Clinton avait proposé de passer une loi pour rendre cette technologie obligatoire, mais les lobbys proarmes s’y sont opposés et le projet a été abandonné.

 

Nous pourrions nous sentir loin de tout cela au Canada. Ce serait oublier que nous avons aussi connu dans les dernières années nos propres histoires d’attaques par armes à feu dans nos écoles. Ne sous-estimons pas l’influence de ce grand voisin.