LETTRE
Le vapotage et le tabagisme chez les ados : les solutions législatives
Une nouvelle étude publiée dans le British Medical Journal montre une augmentation spectaculaire du vapotage chez les adolescents canadiens, associée à une augmentation simultanée de la consommation de cigarettes traditionnelles. Cette étude est la première à mettre en lumière les effets initiaux de la loi fédérale qui a ouvert le marché canadien aux gros joueurs de l’industrie du vapotage, où prédomine désormais l’industrie du tabac.
Les données canadiennes indiquent une augmentation de 79 % du taux des 16 à 19 ans ayant vapoté au cours de la dernière semaine, simultanément à une hausse de 57 % du taux de tabagisme hebdomadaire, et ce, entre 2017 et 2018.
Cette calamité pour la santé publique aurait pu être évitée, les organisations de lutte antitabac ayant averti le gouvernement de ce danger lors des débats entourant le projet de loi S-5, dont l’adoption a légalisé la vente ainsi que la promotion tous azimuts des cigarettes électroniques.
Tel que redouté, dès l’entrée en vigueur de S-5 en mai 2018, un tsunami d’activités promotionnelles est apparu à la télévision, sur des panneaux d’affichage extérieurs et dans les points de vente, sur les murs de métro, sur Facebook, Instagram et YouTube, ainsi que dans le cadre de vastes installations artistiques et d’événements de rue. Ce battage publicitaire, ainsi que l’apparence anodine de ces produits (certains ressemblant à des clés USB, d’autres à des gadgets modernes et colorés) et la gamme de saveurs disponibles ont sans aucun doute contribué à leur popularité chez les jeunes.
Autrement dit, les législateurs fédéraux ont fait fi de toute prudence en permettant à l’industrie du vapotage d’attirer facilement les jeunes vers ses produits avec nicotine, qui créent une forte dépendance.
Et même si l’on a interdit aux fabricants de cibler les enfants, tous ceux qui possèdent une connaissance rudimentaire de l’industrie du tabac savent à quel point il a été facile pour celle-ci d’attirer les jeunes vers les cigarettes sans les cibler directement. Comme pour le tabac, la promotion du vapotage ne devrait pas être vue par les jeunes et ces produits ne devraient pas leur plaire, peu importe les garanties que l’industrie puisse offrir.
Le pire, c’est qu’il appert que le vapotage a effectivement mené à une augmentation du tabagisme chez les jeunes, renversant d’un trait la tendance au déclin observée au cours des 20 dernières années obtenue grâce à des investissements massifs en programmes antitabac, aux campagnes de sensibilisation et à d’autres politiques publiques.
Or, au lieu d’intervenir à l’aide d’une loi d’urgence, la ministre de la Santé Ginette Petitpas Taylor (au courant des nouvelles données depuis sept mois) a lancé de longues et fastidieuses consultations concernant d’éventuelles réglementations, qu’il pourrait prendre des années à mettre en œuvre.
Toutefois, si le gouvernement n’arrive pas à limiter davantage la publicité de ces produits d’ici septembre, l’industrie du vapotage pourra continuer de les promouvoir, et des dizaines de milliers d’autres jeunes développeront une dépendance à la nicotine au cours de la prochaine année scolaire.
Si nos parlementaires fédéraux se soucient réellement de la santé de nos adolescents, ils doivent reconnaître leur erreur et s’engager à changer la loi dès la reprise des travaux parlementaires après les prochaines élections.
Coécrit par:
Médecins pour un Canada sans fumée, Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, Action on Smoking & Health (Alberta) , Manitoba Tobacco Reduction Alliance, Ontario Campaign for Action on Tobacco, Newfoundland and Labrador Alliance for the Control of Tobacco et Coalition antitabac du Nouveau-Brunswick