ÉDITORIAL
À louer : utérus
Je suis aujourd’hui ulcéré que certains l’envisagent comme une simple transaction financière. Déjà, les termes : « gestation pour autrui » (GPA). Donc porter un enfant, mais avec un vernis scientifique, comme des animaux femelles, mais dans un beau geste, le contraire de l’égoïsme, suggérant que faire un enfant, ce ne serait pas pour soi ni pour l’enfant lui-même. Pourtant, ne s’agit-il pas d’un acte intime et affectif?
Cependant, a-t-on pensé à l’enfant lui-même? D’entrée de jeu, il serait orphelin de mère (problèmes en vue…), mais en plus, il aurait été une marchandise, un produit acheté. Or, à combien se monte le prix d’un enfant? Et si on ajoute à celui de la location du ventre de la mère porteuse? Ce n’est pas une location de chalet! Ironiquement, les tenants de la gestation pour autrui placent la vie, le droit à donner la vie par-dessus tout. Cela, dans une société où l’enfant est pour ainsi dire adoré. N’est-ce pas un peu contradictoire?
Et je ne parle pas des aspects juridiques. Les acheteurs doicvent-ils faire une déclaration officielle d’adoption pour ces petits? Qui est leur mère légale? Et même avec une renonciation officialisée de la mère biologique, cette dernière pourrait-elle les revoir? Au vu de ce qui se passe avec les milliers d’enfants produits par les banques de sperme, résultats de la sélection génétique d’un donneur « idéal » sur catalogue, nous sommes en droit d’être sceptiques. Là encore, on semble oublier que tout être humain a besoin de connaître ses racines…
Mais revenons aux droits individuels, comme celui « d’avoir un enfant », dixit le député Anthony Housefather dans son argumentaire, qui propose de décriminaliser la rémunération des mères porteuses. Admettons… et celui pour une femme de disposer de son corps? Vous me rétorquerez : justement, elle peut en faire ce qu’elle veut. Vous connaissez beaucoup de femmes avec un revenu suffisant, qui porteraient un bébé juste pour le plaisir de faire plaisir, par altruisme? Si cela arrive, alors il est justement essentiel que cela reste gratuit, non? Qui va alors se proposer pour louer son corps? Les plus vulnérables, celles qui ont besoin d’argent. Le pire, c’est que le député fédéral avance lui-même cet argument : « Les femmes pauvres peuvent améliorer leur situation financière […] du moment qu’elles font un choix sans contrainte». Et la pauvreté, c’est pas une contrainte? C’est à l’heure actuelle exactement ce qui se passe aux États-Unis ou en Inde, où c’est un business comme un autre.
La loi actuelle criminalise l’achat d’un bébé, pas le fait d’en porter un; la femme garde son entière liberté, cependant, gagner de l’argent avec est répréhensible. Nuance. Veut-on vraiment que le corps des femmes devienne un produit commercialisable, qu’être enceinte se mue en un service contre rétribution? Et pourquoi légaliser la vente du rein, du foie, du sang? Ça s’arrêterait où? Mais en aucun cas, on ne peut le légaliser, sous prétexte que « sinon les gens vont aller le faire ailleurs ». La dignité ne s’achète nulle part. Alors que plusieurs luttent afin que les femmes soient reconnues à leur juste valeur dans notre société et soient respectées dans leur intégrité, ce me semblerait être une immense régression. Vous voulez avoir un enfant? Adoptez-en un, vous ferez à coup sûr un heureux!