ÉDITORIAL
Qui en profitera vraiment?
Tout le monde conviendra qu’à l’ouest de Gatineau, ici à Aylmer, nous avons été les parents pauvres des installations sportives depuis la fusion. Le beau centre aquatique Paul Pelletier ne peut masquer cette réalité. Je devrais dire « ne pouvait » masquer cette réalité. En effet, vous avez appris la nouvelle en même temps que moi, les écoles secondaires d’Arcy Mcgee et Grande-Rivière, nos deux écoles de secteur, vont recevoir 2,5 millions de dollars afin de financer des infrastructures sportives. Et pas n’importe lesquelles : deux terrains synthétiques d’extérieur.
Revenons deux secondes sur l’origine de cette manne. Elle est d’abord le fruit d’un travail de sape de plusieurs années de la part des institutions, des élus et de la société civile. Bref, c’était prévu. Ce n’est certainement pas le résultat d’une « priorité » soudaine pour les saines habitudes de vie de notre jeunesse ou d’un changement de politique de la part du gouvernement Couillard. Le gouvernement précédent avait déjà pris l’engagement. Est-ce vraiment pour accueillir plus de familles dans ce coin de la ville, comme l’a affirmé le ministre délégué au loisir et au sport, Luc Fortin? Je ne crois pas qu’il connaisse vraiment la saturation que le nord du secteur est en train de vivre ou l’anarchie d’un développement urbain laissé entre les mains de constructeurs dont l’unique objectif est le profit.
En revanche, je suis d’accord avec lui : il s’agit bel et bien d’investissement. Bien que personnellement je n’aime pas accoler ce mot à ce qui relève de l’humain, j’admets que l’injection d’une telle somme est une rare opportunité pour la communauté. Les élèves des écoles concernées, mais également les clubs, les groupes et, soyons fous, même les individus devraient pouvoir pro-fiter de ces terrains.
Malheureusement, les images parlent d’elles-mêmes : malgré la référence au soccer et au rugby dans l’article du Bulletin de la semaine dernière, la photo en première page est éloquente; outre les uniformes d’équipes scolaires, les seuls autres symboles sont un casque et un ballon de football…
Le fait est que le développement récent de la ligue secondaire de football a été un argument majeur dans l’obtention de ces subventions gouvernementales. Quant au soccer, étant parent de joueuse et coach occasionnellement, je sais qu’il y a des besoins criants. Toutefois, la collusion est telle entre la ville et les clubs de soccer de Gatineau qu’il est déjà presque impossible pour d’autres sports d’accéder aux terrains d’extérieur. La preuve? Même dans le cas des terrains de la ville ou des écoles, c’est aux clubs de soccer qu’il faut faire la demande pour les utiliser! Dans le cas de ces deux sports, il n’y a aucune pitié ou ouverture aux autres, contrairement à ce qui a été avancé. Le terrain synthétique de Mont-Bleu en est un bel exemple : il est tout simplement inaccessible.
Sans compter un élément dès plus important : le prix. Une fois construit, ce genre d’installation, soi-disant accessible à la communauté, devient hors de prix à la location. À moins d’être déjà une grosse fédération ou un club bien doté, un sport déjà visible. Bref, on en revient toujours aux mêmes, seuls le football ou le soccer peuvent se l’offrir.
Mais loin de moi l’idée de rester sur ce constat amer. Mon message se veut plus positif. Arrêtons d’être hypocrites. Si existent une réelle volonté d’ouverture à la communauté, un authentique désir d’offrir une grande variété d’activités, pour tous les goûts et toutes les bourses, alors il faudra que cela se traduise par des actions et des prix adéquats le moment venu. Très simple, non?